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Le rapport de Hans Blix : les armes de la terreur

Ben Cramer

Par Ben Cramer, 8 juillet 2006

« Nous devons réveiller l’ambition de sortir de l’ère nucléaire » écrivent une dizaine d’experts du monde entier dans un rapport rendu public par le suédois Hans Blix, qui préside la commission indépendante sur les armes de destruction massive. [1]

Financée en partie par le gouvernement suédois et en partie par la Fondation Simons à Vancouver, et jouissant ainsi d’un appui du gouvernement Canadien, la commission Blix a accompli sa mission. Il faut dire que ses débuts furent tragiques.

« Jamais auparavant y a t-il eu autant d’ambitions pour acquérir des bombes » écrivait en septembre 2003 Anna Lindh, alors la ministre suédoise des Affaires Étrangères, à son ami Ken Koates, député travailliste au Parlement Européen. Quelques jours après, le 11 septembre, elle fut assassinée.

Au mois de décembre de la même année, Kofi Annan désigne alors Hans Blix pour lui succéder à la tête de cette commission. Depuis, 230 pages ont été noircies pour mettre en garde contre certaines "armes de la terreur" et les risques de voir le monde tourner le dos au désarmement. Au chapitre de la militarisation, le panel attire l’attention sur le fait que « les armes conventionnelles peuvent être mises en orbite et actuellement, rien ne l’interdit .Il faut changer cette situation à tout prix. »

Stagnation du désarmement

Pas besoin d’insister sur le fait que les efforts de désarmement stagnent. Le volume des arsenaux en présence, (plus de 11 000 armes nucléaires détenus par les Etats-Unis et la Russie), est là pour le prouver. Cela confirme les propos de Kofi Annan lui-même pour qui c’est comme si le monde faisait du somnambulisme nucléaire. » Mais le constat n’exclut pas les opportunités. Interrogé au Conseil Oecuménique des Églises à Genève sur les sommes insensées investies dans ces programmes, Blix rétorque avec un sourire : « vous savez, nous avons peut-être des alliés inespérés. Je pense aux militaires. N’allez pas croire pas qu’ils soient satisfaits à l’idée que tant d’argent soit investi dans les arsenaux nucléaires."

Sur la prolifération nucléaire, le rapport énumère les vagues successives de proliférateurs. Dans la troisième vague, il inclut la Corée du Nord, l’Irak (le premier État condamné par l’AIEA pour avoir violé un accord de garanties...en juillet 1991 - ) et - ce qui est parfois contesté - la Libye.

Concernant le spectre de la prolifération actuelle, brandie à tout va, Hans Blix ne hurle pas avec les loups ; il semble soucieux de sélectionner les enjeux. « Je crois qu’exiger des dirigeants iraniens une réponse dans les 15 jours (à la proposition des 6) n’est pas nécessaire. En Corée du Nord, là, la situation est différente, il y a des armes nucléaires, c’est beaucoup plus urgent d’agir ou de réagir . ». déclare t-il le 21 juin devant un parterre d’ONG, après un discours à l’UNIDIR. Réduire la menace nucléaire

S’il est temps au moins de réduire graduellement la menace nucléaire à l’égard du monde, encore faut-il examiner la marche à suivre. A cet égard, le rapport fournit des pistes. L’ancien patron de l’AIEA- où il a été en poste pendant seize ans - ne manque pas de propositions. 60 recommandations ont été répertoriées dans cet ouvrage dont la moitié concernant les armes nucléaires.

Il exhorte, entre autres, tous les pays à accepter le Traité d’interdiction des essais nucléaires (CTBT), ce qui n’est pas une mince affaire : cela fait dix ans qu’il a été concocté et cela fait dix ans qu’il est en ’stand by’, ne pouvant entrer en vigueur car certaines signatures et non des moindres sont aux abonnés absents. Le rapport prédit que si rien n’est fait dans un bref, délai, dont la ratification par le Congrès (US), nous assisterons à une reprise des essais nucléaires, ce qui a peu de chances d’encourager la marche vers le désarmement.

Le rapport mentionne aussi l’un des dossiers qui pourrait débloquer et réveiller la Conférence du Désarmement : un traité sur l’arrêt de production des matières fissiles. (uranium enrichi et plutonium) qu’on traduit dans le jargon onusien par les acronymes anglo-saxons ’FMCT’ ou encore"cut-off". Cette recommandation tombe à point nommé car une dynamique pourrait s’enclencher, même si les États-Unis n’ont pas prévu des procédures de vérification dans leur récente proposition. Le rapport sur les ADM s’adresse à la fois aux gouvernements, aux groupes de réflexion , aux ONG et au grand public. En réalité, et quel que soit l’écho que lui ont réservé les médias, il s’adresse d’abord aux gouvernants. Même si le style est très diplomatique, les dirigeants des puissances nucléaires sont interpellés. Quand les États dotés d’armes nucléaires ont conseillé aux États non dotés d’armes nucléaires de se tenir à l’écart de tout cela, une voix s’est élevée, pour dire que c’était un peu comme fumer un gros cigare et dire aux plus jeunes de ne pas fumer. Voici une image dont les pacifistes sont friands. Et le rapport ajoute : « ils sont mal placés pour prêcher aux autres. Je pense qu’il y a du vrai là-dedans. »

Souhaitons que ce document - où figure 6 fois le mot "espoir" - ne finisse pas dans les oubliettes de l’histoire comme le rapport Économie de l’Apocalypse sorti en 1995 (publié chez Fayard) et qui faisait suite à une mission d’étude sur la prolifération nucléaire, confiée par le secrétaire général de l’ONU à Jacques Attali..

Il est vrai que parmi les auteurs - qui cherchent un moyen de libérer le monde de ces « armes de la terreur », certains sont bien placés pour ne pas l’enterrer. L’un d’entre eux est le Sri Lankais Jyantha Dhanapala. Il fut en charge du désarmement aux Nations unies, de 1997 à 2003 et rien n’interdit de penser qu’il a des chances de prendre la succession de Kofi Annan.

Espérons enfin que le rapport de la commission Blix aura une vie plus longue et des retombées plus visibles que la fameuse Commission Canberra (dont fut membre Michel Rocard) . Elle exposait - déjà ! - que le problème de la prolifération nucléaire est inextricablement lié au fait qu’un petit nombre d’Etats continue à disposer de l’arme nucléaire.

Ben CRAMER


 


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